Le Cinéma d'Aska

des films, du cinéma, de la télé, moi.

Jarhead

Vu le 16/01/2006 à l'UGC George 5 salle 1 (balcon)
Langue : anglais
Conditions : bonnes
Post Générique : non. Mais la chanson du générique, qui est celle aussi de la bande-annonce, est vraiment bien.

L'histoire en une phrase : Swofford s'engage chez les marines à l'aube de la première guerre du golfe.

Critique :

Jarhead joue avec les références. Très ancré dans le genre du film de guerre, le réalisateur Sam Mendes ne les cache pas. S'il sait en jouer comme nous allons le voir, il limite irrémédiablement la portée de son film qui se rapproche plus de Les Sentiers De La Perdition que d'American Beauty, ce dernier portant la vision nouvelle d'un artiste plus que la volonté de se frotter classiquement à un genre. Reste que Jarhead vaut le coup d'oeil.
Concernant les références, trois sautent aux yeux. La première est le court passage avec le sergent instructeur colérique qui reprend certaines tournures de celui de Full Metal Jacket. Mendes évite la redite en écourtant au maximum ce passage, très bon au demeurant, pour plus s'attacher à la sélection de Swofford comme Sniper.
De la même manière Apocalypse Now et Voyage Au Bout De L'Enfer seront évoqués et même directement dans le film, par l'intermédiaire d'images des films, ceux-ci servant tout simplement de références pour les marines de Jarhead instaurant ainsi une certaine connivence avec le spectateur qui ne connaît la guerre qu'à travers eux. Reprenant une structure presque classique entraînement-terrain/attente-guerre, Mendes va nous montrer que la guerre a beaucoup changé depuis le Vietnam.

Swofford est donc un soldat d'infanterie dont un certain talent pour le tir lui permet de devenir un sniper. Enrôlé peu avant l'invasion du Koweit par l'armée irakienne, lui et son régiment seront parmi les premiers à se déployer (par des avions de lignes de la TWA!) à proximité du théâtre des opérations. Mais d'opérations, il n'y en aura pas beaucoup car Jarhead raconte une attente, une attente longue puis une guerre frustrante dont la phase terrestre n'aura durée qu'une centaine d'heures.
L'attente est souvent drôle : duel de scorpions (très bon), tableau des photos des (ex) petites amies des marines, entraînements avec masque à gaz, corvée de nettoyage des chiottes, hydratation, déshydratation ... Sam Mendes a le souci du détail, de l'anecdote vraie mais avec une réjouissante touche de comédie. Cette somme de détails du quotidien ont leur importance car elle décrit des troupes en guerre mais qui ne combattent pas. A cet attente, cette guerre qui ne vient pas, les soldats seront paradoxalement tout autant sous pression un peu comme des personnes sur le point de faire l'amour mais stoppé avant de pouvoir conclure (pardonnez-moi cette comparaison. Oh puis non, c'est vraiment l'impression que j'ai eue!). Il n'est alors pas si anodin de voir la colère puis une certaine folie s'élever chez les soldats et particulièrement chez Swofford.

La mise en scène est simple dans le bon sens du terme, ainsi la sélection avec de moins en moins de candidats à chaque footing, et elle est centrée intégralement sur le personnage de Swofford. Toute l'action est comme vue de ses yeux et filmée par un Mendes qui refusa tout plan d'ensemble. Finalement, et de son propre aveu, il montre une guerre que nous avons assez peu vu à hauteur d'homme mais plus à travers des bombardements et autres frappes chirurgicales.
Le casting est, comme souvent dans le genre, composé de gueules (Chris Cooper, Dennis Haysbert...) et de jeunes premiers comme Jack Gyllenhaal, Jamie Foxx (qui est aussi une gueule d'ailleurs) et surtout Peter Sarsgaard qui est le personnage le plus intéressant du film.
Car du beau parti pris du réalisateur, on pourra regretter le manque d'enjeu, le sort et l'état d'esprit des protagonistes demeurant à peu près constants tout au long du film. Ce manque d'émotion, d'attachement aux personnages, et une tension trop sporadique empêchent Jarhead d'être un grand film de guerre. Et le personnage qui sort du lot est bien ce Troy, interprété par Sarsgaard, qui semble vouloir à tout prix devenir un marine mais qui demeure frustré de ne pouvoir passer, ne serait-ce qu'une seule fois, à l'action.

La politique est également à hauteur d'homme. Nous assistons à un bourrage de crane obligatoire des troupes, présenté à la manière d'un show à l'américaine par un colonel enthousiaste, puis à une visite d'une équipe de télévision où le chef du régiment demande presque en ami à ses soldats de dire que tout se passe bien, qu'ils sont très motivés... le résultat de ces conseils seront... particuliers. Car Mendes nous fait rire jusque dans les moments les moins triviaux comme cette prise de médicament quasi obligatoire avec signature d'une décharge sur ses effets secondaires!

C'est cette prise de médicament qui sera le préambule d'une guerre terrestre d'une poignée de jours. Visuellement, c'est la meilleure partie du film : puits de pétroles en feu, pluie de brut, autoroutes dévastées, cendres, désert rouge... Mendes montre les dégâts causés par les frappes aériennes et la retraite des Irakiens à travers des images presque fantastiques. Quant aux combats terrestres, ils n'auront pas vraiment lieu et les victimes de guerre côté américain, dès l'entraînement, seront dans Jarhead le fait de bavures. La scène de la tour de contrôle résume à elle seule la frustration et l'incompréhension dans cette courte guerre.

Sam Mendes nous a donc raconté une guerre remplie d'attente et de frustration bien différente des visions, des références que nous avons, et que les soldats ont eux-mêmes. Sans surprise, le résultat demeure le même : la folie et la mort, même accidentelle, rôdent. Jarhead apporte donc sans souci sa pierre à l'édifice des bons films de guerre. Et l'incursion de Mendes dans le genre est donc réussie et maîtrisée.

La scène qui tue : En dehors de toutes les images superbes du dernier tiers, la scène du rituel d'acceptation d'un soldat dans le corps d'un marine vers la fin du film, dure et émouvante, interpelle.

Mon avis express : En filmant exclusivement à hauteur d'homme la première guerre du golfe, Sam Mendes nous raconte la longue attente et la frustration d'une poignée de soldats américains. Certes, le réalisateur ne révolutionne pas le genre mais il a de l'humour et un sacré bon sens pour les belles images et les détails significatifs.

Revoir le film : oui.
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