Munich
Vu le 29/01/2006 au Max Linder Panorama Salle 1
Langue : anglais
Post Générique : non
Conditions : la salle est excellent. Trois niveaux. Je me trouvais au troisième. J'aurais peut-être du aller au second mais c'était bien. A part ça, j'ai eu envie d'uriner, comme pour Million Dollar Baby. C'est lourd.
L'histoire en une phrase : Suite au massacre de leurs athlètes lors des JO de 1972 par un groupe terroriste, l'Israël lance une opération secrète pour assassiner les principaux commanditaires de cet outrage.
Critique :
Steven Spielberg enchaîne les films pour notre plus grand bonheur. Tous ses films des années 2000, du beau et personnel A.I. au terrifiant Guerre Des Mondes sont de très grandes réussites. Même s'il n'est pas parfait, Munich maintient le cap.
Munich est fondé sur des faits réels. Et c'est tout. Le scénario s'est notamment appuyé sur un livre controversé intitulé Vengeance: The True Story Of An Israeli. Quoi qu'il en soit, il sera difficile de connaître un jour ce qui s'est vraiment passé. Il ne s'agit donc pas pour Spielberg de raconter une histoire vraie ou de refaire l'histoire mais par le biais de ces événements tragiques, l'interprétation des événements du passé permet à Spielberg de nous donner sa vision de notre monde. Difficile pour moi de dire si elle est juste, mais ses pistes sont pertinentes et il nous les livre avec son sens inné (et acquis) de l'entertainment.
Munich va donc suivre les traces d'Avner et de son groupe d'intervention qui va traquer et abattre les organisateurs de la prise d'otage sanglante lors des jeux olympiques de 1972. Ce groupe n'a aucune existence légale et est en charge d'une sorte de vengeance qui traduit la volonté d'Israël de répondre à la violence des terroristes, de leur faire comprendre qu'ils ne resteront pas sans agir après un tel acte quitte à faire des compromissions avec leurs principes.
Au fil des assassinats, Spielberg nous rappelle que la vengeance n''est pas nécessairement salvatrice de deux manières. La plus évidente repose sur l'idée simple que la violence engendre la violence, que la mort d'un commanditaire ne fait que précéder son remplacement par un autre ou par plusieurs autres. C'est l'escalade de la violence. Cet aspect est certes très appuyé (jusqu'au tout dernier plan du film) mais peut-on le reprocher au réalisateur alors que l'Histoire lui donne souvent raison?
L'autre manière est un parallèle entre les meurtres et l'état psychologique et physique d'Avner dont le teint devient de plus en plus blafard. La vengeance qu'il mène n'engendre chez lui ni libération ni même un simple soulagement. Au contraire, il devient tendu, méfiant, au bord de l'explosion, habité par la violence de ses actes et surtout de celle du massacre de ses compatriotes dont le déroulement morbide survient tout au long du film jusqu'à cette étreinte avec sa femme, plutôt casse-gueule, mise en parallèle avec l'attaque ratée contre les terroristes (notons qu'elles sont vues comme si Avner vivait ces moments de l'intérieur. Comme un... réalisateur?). Avner vit alors dans la peur et dans la douleur.
Quoi qu'il en soit, il ressort un des aspects de nos sociétés modernes : la peur et la paranoïa. Avner personnifie donc cette peur et cette confusion dans ses certitudes. Il est peut-être plus que ça car son aspect plutôt humain, un peu décalé par rapport à sa mission, en fait plus un choix de réalisateur qu'un choix militaire et témoigne bien de la volonté du metteur en scène non pas de faire un documentaire mais de raconter un drame humain et de décrypter notre époque.
En effet, il n'est sans doute pas si difficile de trouver au sein du Mossad des tueurs froids et surs qui n'auront aucun remord après cette vengeance d'état. Le choix du chef de cette équipée mortelle ne semble pas être l'idée qu'on se fait de l'homme de la situation. Les dignitaires israéliens justifient ce choix en prétextant justement qu'il faut faire le choix inattendu d'un agent sans histoire. Quoiqu'il en soit, Spielberg n'a pas choisi un superhéros ou un agent-machine pour mener la barque.
Enrôlé dans cette cause juste, la violence de la réalité éclate littéralement à la gueule d'Avner à l'image de l'explosion de la bombe dans l'hôtel. La complexité du monde lui fait perdre ses certitudes tandis que la confiance et le soutien de ses supérieurs peut avoir des allures de manipulation. Il y a aussi un certain mimétisme avec ceux-ci puisqu'il n'hésite pas à sortir du cadre de sa mission, parfois au nom de celle-ci, pour accomplir certaines exécutions. Enfin, pour traquer les terroriste, il est obligé de traiter avec des forces presque occultes s aux contours peu définies et au jeu ambivalent, toute la séquence assez drôle de la planque l'attestant.
Incompréhension d'un monde trop complexe et violent, perte de ses certitudes, perte de confiance envers ses gouvernants, prêt à tomber dans la théorie du complot, peur et paranoïa, Avner sera laissé livré à lui-même dans le cycle sans fin de la violence. Au fond, cet Avner est peut-être un homme de notre temps, un très beau personnage.
Reste que le propos de l'auteur n'est pas toujours à la hauteur. On pourra regretter un rythme un peu laconique et ce n'est pas seulement mon envie d'uriner pendant la deuxième partie de la séance qui m'a fait trouver le temps long. Spielberg essaye d'aborder tous les aspects du problème à travers une foultitude de personnages (200 rôles parlants) qui rendent Munich un peu bavard surtout que certains dialogues sont un peu justes, comme celui entre Avner et le terroriste palestinien. Plus embêtant, le groupe d'assassins n'est pas toujours convaincant chacun des personnages étant réduits trop lourdement à des figures figées. Seul Avner évoluera dans le film.
Mais il ne faut pas oublier le principal : Steven Spielberg n'a pas vraiment renoncer à faire du cinéma et il se montre le plus souvent fichtrement en forme!
Munich, c'est aussi la reconstitution bluffante d'une époque, particulièrement ce Paris des années 70 qui a ébloui mes yeux de parigot (tête de veau). Pour l'occasion, le spectateur pourra croiser dans Munich de nombreux acteurs français tous talentueux particulièrement le duo Mathieu Almaric/Michaël Lonsdale responsable d'une mystérieuse organisation fournissant des informations sur les cibles du groupe d'Avner. Notons dans ce groupe, la présence tout en puissance de Daniel Craig, futur James Bond. Je lui souhaite bonne chance (surtout depuis que j'ai appris que le script de Casino Royale n'était forcément pas bon).
Munich est aussi un excellent film d'espionnage. On n'aura pas fini de dire que Spielberg se sera beaucoup inspiré des films d'espionnage des années 70. Le résultat est très bon avec suffisamment de détails, ainsi toute la partie d'assignation de la mission avec notamment l'obsession de la note de frais lors d'une scène très drôle, et d'intrigues géopoliticiennes pour paraître crédible. Quant aux meutres en eux-mêmes, ils sont crues et dures, une violence sèche et concise même lors de la mémorable séquence de fusillade à Beyrouth.
On l'a déjà dit aussi, la collaboration de Spielberg avec Janusz Kaminski est de plus en plus fructueuse et les images de Munich sont tout simplement magnifiques.
Enfin, on retrouve sur le fond comme sur la forme la patte du metteur en scène. Nous avons même droit à une superbe Spielbergerie (mot employé par Télérama à propos de certains aspects de Saving Private Ryan) soit une séquence qui porte la marque Spielberg. Ici, c'est la scène de la fillette qui répond au téléphone piégé, un modèle de suspense que beaucoup trouvent agaçants. Autres exemples : Timmy sur la barrière électrique dans Jurrassic Park ou la douche dans La Liste De Schindler.
Et bien sur, Munich parle de la famille, un des thèmes de prédilection de l'auteur. L'absence de sa famille joue un rôle prépondérant dans l'état psychologique d'Avner. Spielberg va aussi plus loin en évoquant l'idée que la « vraie » terre pourrait être tout simplement sa propre famille qu'elle soit en Israël ou aux USA. Naïf peut-être, mais la vision est sincère et indispensable aux yeux de l'auteur qui, en décrivant une réalité plutôt pessimiste, voulait surtout nous délivrer « une prière pour la paix ».
La scène qui tue : l'explosion dans la chambre d'hôtel. Soudain, sourd et gore auxquels succède panique et effroi. Terrible.
Mon avis express : En se basant sur des faits réels, la prise d'otage sanglante aux jeux olympiques de Munich en 1972, Steven Spielberg nous livre une vision de notre monde. C'est un pari risqué. Et Munich n'est à ce titre pas toujours convaincant et la volonté de rendre compte de la complexité des enjeux alourdit parfois le film. Mais le propos demeure souvent pertinent et surtout, Munich est un mémorable film d'espionnage, sec et violent.
Note : on ne le dira jamais assez, le magazine Mad Movies est excellent et je conseille à tous la lecture de la critique, selon moi définitive, du film Munich dans le numéro du mois de janvier (attention je ne parle pas de celle du site, très bonne au demeurant).
Langue : anglais
Post Générique : non
Conditions : la salle est excellent. Trois niveaux. Je me trouvais au troisième. J'aurais peut-être du aller au second mais c'était bien. A part ça, j'ai eu envie d'uriner, comme pour Million Dollar Baby. C'est lourd.
L'histoire en une phrase : Suite au massacre de leurs athlètes lors des JO de 1972 par un groupe terroriste, l'Israël lance une opération secrète pour assassiner les principaux commanditaires de cet outrage.
Critique :
Steven Spielberg enchaîne les films pour notre plus grand bonheur. Tous ses films des années 2000, du beau et personnel A.I. au terrifiant Guerre Des Mondes sont de très grandes réussites. Même s'il n'est pas parfait, Munich maintient le cap.
Munich est fondé sur des faits réels. Et c'est tout. Le scénario s'est notamment appuyé sur un livre controversé intitulé Vengeance: The True Story Of An Israeli. Quoi qu'il en soit, il sera difficile de connaître un jour ce qui s'est vraiment passé. Il ne s'agit donc pas pour Spielberg de raconter une histoire vraie ou de refaire l'histoire mais par le biais de ces événements tragiques, l'interprétation des événements du passé permet à Spielberg de nous donner sa vision de notre monde. Difficile pour moi de dire si elle est juste, mais ses pistes sont pertinentes et il nous les livre avec son sens inné (et acquis) de l'entertainment.
Munich va donc suivre les traces d'Avner et de son groupe d'intervention qui va traquer et abattre les organisateurs de la prise d'otage sanglante lors des jeux olympiques de 1972. Ce groupe n'a aucune existence légale et est en charge d'une sorte de vengeance qui traduit la volonté d'Israël de répondre à la violence des terroristes, de leur faire comprendre qu'ils ne resteront pas sans agir après un tel acte quitte à faire des compromissions avec leurs principes.
Au fil des assassinats, Spielberg nous rappelle que la vengeance n''est pas nécessairement salvatrice de deux manières. La plus évidente repose sur l'idée simple que la violence engendre la violence, que la mort d'un commanditaire ne fait que précéder son remplacement par un autre ou par plusieurs autres. C'est l'escalade de la violence. Cet aspect est certes très appuyé (jusqu'au tout dernier plan du film) mais peut-on le reprocher au réalisateur alors que l'Histoire lui donne souvent raison?
L'autre manière est un parallèle entre les meurtres et l'état psychologique et physique d'Avner dont le teint devient de plus en plus blafard. La vengeance qu'il mène n'engendre chez lui ni libération ni même un simple soulagement. Au contraire, il devient tendu, méfiant, au bord de l'explosion, habité par la violence de ses actes et surtout de celle du massacre de ses compatriotes dont le déroulement morbide survient tout au long du film jusqu'à cette étreinte avec sa femme, plutôt casse-gueule, mise en parallèle avec l'attaque ratée contre les terroristes (notons qu'elles sont vues comme si Avner vivait ces moments de l'intérieur. Comme un... réalisateur?). Avner vit alors dans la peur et dans la douleur.
Quoi qu'il en soit, il ressort un des aspects de nos sociétés modernes : la peur et la paranoïa. Avner personnifie donc cette peur et cette confusion dans ses certitudes. Il est peut-être plus que ça car son aspect plutôt humain, un peu décalé par rapport à sa mission, en fait plus un choix de réalisateur qu'un choix militaire et témoigne bien de la volonté du metteur en scène non pas de faire un documentaire mais de raconter un drame humain et de décrypter notre époque.
En effet, il n'est sans doute pas si difficile de trouver au sein du Mossad des tueurs froids et surs qui n'auront aucun remord après cette vengeance d'état. Le choix du chef de cette équipée mortelle ne semble pas être l'idée qu'on se fait de l'homme de la situation. Les dignitaires israéliens justifient ce choix en prétextant justement qu'il faut faire le choix inattendu d'un agent sans histoire. Quoiqu'il en soit, Spielberg n'a pas choisi un superhéros ou un agent-machine pour mener la barque.
Enrôlé dans cette cause juste, la violence de la réalité éclate littéralement à la gueule d'Avner à l'image de l'explosion de la bombe dans l'hôtel. La complexité du monde lui fait perdre ses certitudes tandis que la confiance et le soutien de ses supérieurs peut avoir des allures de manipulation. Il y a aussi un certain mimétisme avec ceux-ci puisqu'il n'hésite pas à sortir du cadre de sa mission, parfois au nom de celle-ci, pour accomplir certaines exécutions. Enfin, pour traquer les terroriste, il est obligé de traiter avec des forces presque occultes s aux contours peu définies et au jeu ambivalent, toute la séquence assez drôle de la planque l'attestant.
Incompréhension d'un monde trop complexe et violent, perte de ses certitudes, perte de confiance envers ses gouvernants, prêt à tomber dans la théorie du complot, peur et paranoïa, Avner sera laissé livré à lui-même dans le cycle sans fin de la violence. Au fond, cet Avner est peut-être un homme de notre temps, un très beau personnage.
Reste que le propos de l'auteur n'est pas toujours à la hauteur. On pourra regretter un rythme un peu laconique et ce n'est pas seulement mon envie d'uriner pendant la deuxième partie de la séance qui m'a fait trouver le temps long. Spielberg essaye d'aborder tous les aspects du problème à travers une foultitude de personnages (200 rôles parlants) qui rendent Munich un peu bavard surtout que certains dialogues sont un peu justes, comme celui entre Avner et le terroriste palestinien. Plus embêtant, le groupe d'assassins n'est pas toujours convaincant chacun des personnages étant réduits trop lourdement à des figures figées. Seul Avner évoluera dans le film.
Mais il ne faut pas oublier le principal : Steven Spielberg n'a pas vraiment renoncer à faire du cinéma et il se montre le plus souvent fichtrement en forme!
Munich, c'est aussi la reconstitution bluffante d'une époque, particulièrement ce Paris des années 70 qui a ébloui mes yeux de parigot (tête de veau). Pour l'occasion, le spectateur pourra croiser dans Munich de nombreux acteurs français tous talentueux particulièrement le duo Mathieu Almaric/Michaël Lonsdale responsable d'une mystérieuse organisation fournissant des informations sur les cibles du groupe d'Avner. Notons dans ce groupe, la présence tout en puissance de Daniel Craig, futur James Bond. Je lui souhaite bonne chance (surtout depuis que j'ai appris que le script de Casino Royale n'était forcément pas bon).
Munich est aussi un excellent film d'espionnage. On n'aura pas fini de dire que Spielberg se sera beaucoup inspiré des films d'espionnage des années 70. Le résultat est très bon avec suffisamment de détails, ainsi toute la partie d'assignation de la mission avec notamment l'obsession de la note de frais lors d'une scène très drôle, et d'intrigues géopoliticiennes pour paraître crédible. Quant aux meutres en eux-mêmes, ils sont crues et dures, une violence sèche et concise même lors de la mémorable séquence de fusillade à Beyrouth.
On l'a déjà dit aussi, la collaboration de Spielberg avec Janusz Kaminski est de plus en plus fructueuse et les images de Munich sont tout simplement magnifiques.
Enfin, on retrouve sur le fond comme sur la forme la patte du metteur en scène. Nous avons même droit à une superbe Spielbergerie (mot employé par Télérama à propos de certains aspects de Saving Private Ryan) soit une séquence qui porte la marque Spielberg. Ici, c'est la scène de la fillette qui répond au téléphone piégé, un modèle de suspense que beaucoup trouvent agaçants. Autres exemples : Timmy sur la barrière électrique dans Jurrassic Park ou la douche dans La Liste De Schindler.
Et bien sur, Munich parle de la famille, un des thèmes de prédilection de l'auteur. L'absence de sa famille joue un rôle prépondérant dans l'état psychologique d'Avner. Spielberg va aussi plus loin en évoquant l'idée que la « vraie » terre pourrait être tout simplement sa propre famille qu'elle soit en Israël ou aux USA. Naïf peut-être, mais la vision est sincère et indispensable aux yeux de l'auteur qui, en décrivant une réalité plutôt pessimiste, voulait surtout nous délivrer « une prière pour la paix ».
La scène qui tue : l'explosion dans la chambre d'hôtel. Soudain, sourd et gore auxquels succède panique et effroi. Terrible.
Mon avis express : En se basant sur des faits réels, la prise d'otage sanglante aux jeux olympiques de Munich en 1972, Steven Spielberg nous livre une vision de notre monde. C'est un pari risqué. Et Munich n'est à ce titre pas toujours convaincant et la volonté de rendre compte de la complexité des enjeux alourdit parfois le film. Mais le propos demeure souvent pertinent et surtout, Munich est un mémorable film d'espionnage, sec et violent.
Note : on ne le dira jamais assez, le magazine Mad Movies est excellent et je conseille à tous la lecture de la critique, selon moi définitive, du film Munich dans le numéro du mois de janvier (attention je ne parle pas de celle du site, très bonne au demeurant).