Le Cinéma d'Aska

des films, du cinéma, de la télé, moi.

Joyeux Noël

Vu le 7/12/2005 à l'UGC George V salle 4
Langues : anglais, allemand, français. Bel effort d'ailleurs.
Conditions : moyennes. Un couple devant moi avec une femme qui empeste le parfum.
Post Générique : non

L'histoire en une phrase : lors du réveillon de Noël 1914, une trêve entre ennemis s'improvise.

Critique :

Vous pouvez trouver les quelques articles en ligne que j'ai lus sur le film ici.

Joyeux Noël est académique, bien sur, et l'expression « Qualité française » lui va comme un gant. Ce n'est ni un reproche, ni un compliment mais une simple constatation, presque un genre en soi. Mais la plupart des téléfilms à gros budget sont de ce genre. Le pari est donc risqué : ne pas tomber dans le piège du téléfilm de prestige. Pari perdu pour Christian Carion, heureux réalisateur du gentil Une Hirondelle A Fait Le Printemps, qui accumule les fautes de goût dans ce trop inégal Joyeux Noël.

L'élément comique, ressort nécessaire pour l'équilibre du récit paraît-il, est assuré par Dany Boon qui interprète un paysan un peu benêt mais attachant. J'aime bien Dany Boon. Son interprétation, relativement sobre au regard du rôle, ne trouve cependant pas le ton juste. Se dégage alors un des problèmes majeurs du film : le mélange entre la fiction et la réalité, entre le faux et le vrai est raté.
Alors que Carion tenait une histoire extraordinaire, impensable mais authentique, il choisit de rajouter une louche d'historiettes frisant le grotesque ainsi cette histoire d'amour « absolu » où un couple (un soldat et sa femme) qui, pour rester ensemble, se constitue prisonnier dans le camp d'en face (!). Ces intrigues n'apportent, en outre, pas grand chose au film. Pis, elles réduisent sa portée surtout que Carion les noie dans un symbolisme appuyé et un tas de bons sentiments. Accentué par une trop forte concentration d'événements, tous avérés pendant la guerre (la partie de foot, le ténor, l'inhumation des morts du no man's land, la visite des tranchées, la lecture des lettres, le chat...) mais à des endroits différents, Joyeux Noël tombe dans le piège du factice ce qui est gênant pour un film dont la volonté pédagogique est évidente.

Le plus agaçant est que Joyeux Noël est parfois pertinent. Lorsque le général (Bernard Le Coq) fait par à son Lieutenant (Guillaume Canet) de son incompréhension de cette guerre et de sa stratégie ou qu'il affirme que ce qui sauve les soldats « rebelles » de l'exécution, c'est qu'ils sont deux cents donc trop nombreux (nous ne sommes pas encore en 1917), Carion fait mouche.
Joyeux Noël fonctionne aussi très bien dans sa description de cette fameuse nuit du réveillon. Tenor et Cornemusiers se répondent, les français sont un peu étonnés et timorés, les sapins sortent des tranchées, les officiers discutent des termes de la trêve tandis que les soldats s'échangent quelques présents ou montrent les photos de leur femme. Tant de petites choses simples mais suffisantes pour nous toucher sans excès. Chritian Carion a su le temps d'une petite demi-heure trouver un bon compromis entre l'Histoire et le cinéma. Dommage qu'une Diane Kruger chantante et horriblement doublée (sans parler du choix douteux d'une chanson interprétée visiblement en studio pour un scène d'extérieur dans une plaine hivernale!), nous conduisent vers un récit moins captivant.

Et parfois nauséabond. Joyeux Noël est aussi un film à message(s). Quand le message est une évocation de l'absurdité de la guerre et de la réconciliation entre les nations, cette trêve miraculeuse franco-anglo-allemande formant les prémisses de l'union européenne, c'est bien. C'est même très bien quand au travers d'une introduction implacable, le réalisateur dénonce l'endoctrinement des peuples et la haine de l'autre. Mais pourquoi faut-il que Carion revendique une dénonciation de Georges Bush à travers le discours d'un prêtre galvanisant les troupes comparés à des anges exterminateurs, scène qui se suffit pourtant très bien à elle-même? Déjà qu'il est difficile d'être porteur d'espoir lorsqu'on raconte une guerre qui n'a fait que conduire à une autre (la seconde guerre mondiale), cet écho forcé de l'Histoire sur l'actualité est lourd et malvenu.

Chistophe Carion tenait vraiment à coeur ce projet depuis 1993. Impossible de douter de sa sincérité car Joyeux Noël ne manque effectivement ni de sincérité ni de louables intentions. Mais ce beau sujet méritait pourtant mieux.

La Scène qui tue : le ténor allemand, chantant pour ses soldats, finit par s'élever hors de la tranchée pour se faire voir des écossais qui sortent à leur tour et applaudissent. Une scène sans doute inratable tant, au vu du contexte et de son authenticité, elle est forte.

Revoir le film : je dirais non.

Ce que ma copine en a pensé : Lorsque j’ai vu la bande annonce du film Joyeux Noël pour la première fois au cinéma. Je me suis dit : “Ils ne savent vraiment plus quoi inventer comme histoire. Des français et des allemands qui s’embrassent pour Noël sur le front de guerre…”. Moi qui pourtant m’intéresse vivement à ce sujet : j’ai lu A L’ouest rien de nouveau et divers autres ouvrages sur la première guerre mondiale, j’ai vraiment été soufflée par cette anecdote qui me paraissait impensable. Aussi, j’ai également été soufflée par ce film. L’impensable survient dans une guerre qui vient d’être entamée. Les frères ennemis se réconcilient timidement au début puis se sauvent mutuellement la vie par la suite. Cette scène où l’officier allemand vient voir le commandant français pour lui proposer de venir dans ses tranchées car dans 15 minutes l’artillerie germanique allait les bombarder est d’une force incroyable. Ce qui est plus émouvant d’ailleurs, c’est le fait qu’à tout moment cette fraternité ténue peut être rompue. Le tir d’une seule personne aurait pu provoquer directement un carnage. Et d’ailleurs, connaissant l’issue historique, on se demande à quel moment cette magie va être rompue. Ce film avance posément, il laisse la part belle à la musique qui réunit les peuples, comprenant qu’ils ont finalement tant de chose en commun. Ce film est en demi-teinte, sucré salé. Il n’expose pas de vérités violemment en pleine figure. On ne pleure pas à chaude larme, au contraire les larmes montent aux yeux mais ne sortent pas. Ce film est magnifiquement réussi. Il mérite d’être vu et revu. A tous un joyeux Noël !

Mon avis express : Film inégal par excellence, Joyeux Noël accumule des faits sur la première guerre mondiale authentiques, souvent étonnants, mais s'égare dans des intrigues proche du roman photo qui décrébilisent tout le récit et sa portée pédagogique. Reste quelques jolies scènes, des détails historiques captivant et surtout une nuit du réveillon mémorable et touchante. On peut très bien se dire que c'est finalement pour ça qu'on est venu au cinéma voir le film. On peut aussi attendre tranquillement une de ses futures (et sans doute nombreuses), diffusion télé, format (hélas) plus adapté.
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